Si vous venez en Martinique durant la période de Pâques vous serez étonnés par la singularité des célébrations de la mort et de la résurrection du Christ. En effet, les Martiniquais restent de fervents chrétiens et Pâques l'une des plus dates les plus importantes de la chrétienté avec Noël est très marquée dans l'île.
Outre la question des crabes à Pâques, on peut se demander pourquoi le Samedi précédant le dimanche de Pâques est appelé à la Martinique Samedi Gloria. Attention, vous verrez également l'appellation « Sanmdi Glorya » en créole martiniquais.
Cette appellation fait référence aux anciens rites spécifiques à cette journée. À l'époque le samedi de la Semaine Sainte était la journée de la consécration des eaux baptismales. Une cérémonie avait lieu sur le parvis de l'église et l'évêque consacrait l'eau qui allait servir aux baptêmes et aux autres rites religieux de bénédiction.
S'en suivait une messe où étaient découverts le crucifix du maître-autel et les statues de l'église précédemment recouverts d'un voile violet dès le Dimanche des rameaux. L'évêque ou le prêtre qui officiait entonnait alors le Gloria in excelsis Deo puis les cloches se mettaient à retentir puissamment. Le Gloria in excelsis Deo, hymne liturgique catholique est un chant de louange en latin à la Sainte Trinité énumérant les qualité des trois personnes divines (le Père, le Fils et le Saint-Esprit). Les premières paroles reprennent le chant des anges à Bethléem.
Ainsi aux Antilles, ce chant est devenu emblématique de la journée qui est devenue Samedi Gloria.
À noter que le concile de Vatican II (11 octobre 1962 - le 8 décembre 1965) convoqué par Jean XXIII qui avait pour but principal de réformer l'Église afin qu'elle puisse s'ouvrir de plus en plus à la société face à un début de désertion des églises a eu des conséquences sur cette journée autrefois symbolique. L'abandon de la messe latin pour utiliser les langues locales et des cérémonies de la Semaine Sainte font que le Gloria in excelsis Deo ne sera plus chanté lors de la messe du Samedi Saint après 1962.
Malgré cela, l'appellation Samedi Gloria est restée aux Antilles.
Samedi Gloria c'est aussi une journée spéciale aux Antilles depuis l'esclavage. Si la journée ne portait pas ce nom à l'époque, c'était aussi une journée importante pour les esclaves. Interdits de jouer au tambour durant tout le carême, période d'abstinence de réjouissances musicales, ils étaient à nouveau autorisés à en jouer et pratiquer le bèlè et le danmyé (voir image ci-contre).
En souvenir de cette tradition qui remonte à plusieurs siècles, Samedi Gloria est en quelque sorte devenu la journée du bèlè et du danmyé en Martinique. Ainsi tous les samedis précédant Pâques, les samedis gloria, la Maison du Bèlè organise des rencontres populaires où des maîtres du danmyé et du bèlè s'exercent devant une foule de passionnés.