Comme un symbole fort, Lumina Sophie Ruptus, née Marie-Philomène Sophie Roptus et surnommée Surprise naît l'année de l'abolition de l'esclavage en Martinique, le 5 novembre 1848 au Vauclin. Elle est connue pour avoir été l'une des héroïnes de l'Insurrection du Sud, première grande révolte des nouveaux affranchis après l'abolition de l'esclavage.
Sa mère, Marie-Sophie dite Zulma avait été esclave et libérée lors de l'abolition de l'esclavage en 1848. Comme celle-ci, elle sera cultivatrice sur leur jardin de maison, ouvrière agricole, marchande des fruits et légumes de leur parcelle et couturière. Elle vit dans des conditions précaires comme beaucoup de travailleurs agricoles à l'époque.
Lumina était dotée d'une forte résistance physique en raison des nombreux déplacement à pied qu'elle effectuait pour vendre les produits maraîchers et les travaux de couture de sa mère, pour participer aux récoltes dans les habitations ou encore participer aux « koud'min » (Aux Antilles, le terme de koud'min est utilisé pour l'entraide entre personnes lors des travaux de construction.). Sa personnalité, son énergie, son caractère vont en faire une des protagonistes les plus mémorables de l'Insurrection du Sud.
En Septembre 1870, elle est enceinte de 2 mois quand débute l'Insurrection du Sud ce qui ne l'empêchera pas de prendre une part active dans les évènements de Rivière-Pilote. Alors marchande, elle est rapidement mise au courant de tout ce qui se préparait et, à l'image des autres marchandes, elle relaie les informations afin de motiver le plus grand nombre de personnes à la cause des insurgés.
Dès le début des évènements, les femmes, armées de torches ou de bâtons entendent défendre la cause des insurgés. Elles marchent dans les champs de cannes où elles travaillaient auparavant, elles combattent, mettent en feu des Habitations, participent aux pillages, supportent le mouvement en préparant des repas pour leurs partenaires masculins, elles prennent la parole et des initiatives afin d'organiser la riposte. Plus d'une centaine de femmes ont pris part au mouvement et sur 114 dénombrées, 15 seront arrêtées. Parmi les femmes arrêtées, il y a Lumina Sophie et les condamnations seront lourdes. Aucune n'est acquittée.
Lumina Sophie est reconnue comme ayant été particulièrement active dans la révolte. Elle est arrêtée le 26 Septembre sur l'Habitation d'Eugène Lacaille et incarcérée au Fort Desaix.
Lors de son procès, Lumina Sophie est désignée par un témoin comme était la « Reine de la compagnie » au milieu des pillardes et des incendiaires. Pour le Gouverneur, elle est la « flamme de la révolte » contre l'aristocratie des planteurs. Le tribunal la reconnaît coupable de blasphème, de pillage, de l'incendie d'au moins 3 Habitations et d'avoir été dans le groupe ayant exécuté Louis Codé, un Blanc riche propriétaire terrien. Elle se voit aussi reprochée en tant que femme d'avoir voulu dominer des hommes, les avoir menacés, de ne pas s'être conformée à l'image de ce qu'est une femme qui doit être soumise aux hommes et être dans la réserve.
Elle accouche à la prison centrale de Fort-de-France d'un petit garçon qui lui sera aussitôt enlevé. Il mourra un an plus tard en prison.
Elle ne fera l'objet d'aucune clémence du jury. Le 8 juin 1871, elle est condamnée aux travaux forcés à perpétuité et déportée au bagne de Saint-Laurent-du-Maroni en Guyane. Elle meurt à l'âge de 31 ans dans le bagne où elle se trouvait. Elle n'aurait pas supporté les durs travaux, les conditions de vie extrêmes telles que l'isolement, l'éloignement de son île natale, la malnutrition et les maladies endémiques.