Musiques contemporaines en Martinique
Nous aborderons ici les différentes musiques du 20-21èmes siècles de la Martinique. À l'image des autres îles de la zone caraïbe, la Martinique a suivi un schéma presque similaire marqué par les influences des différentes vagues d'immigration venues d'Europe et d'Afrique.
Mais son histoire d'île française qui a connu l'esclavage pendant près de deux siècles aura bien sûr marqué sa musique qui va emprunter des rythmes aussi bien aux ballets, valses et menuets français qu'aux musiques plus rythmées venues d'Afrique.
Bien que les musiques martiniquaises et guadeloupéennes présentent de nombreuses similitudes, elles ne sont pas les mêmes du fait de leur histoire. Ainsi la Guadeloupe qui a connu une première abolition de l'esclavage entre 1794 et 1802 s'était remise à la musique au tambour et à honorer leurs dieux, les religieux ayant fui l'île avant l'abolition ou ayant été déportés.
Rétablie en 1802, la musique populaire de la Guadeloupe est donc la musique africaine, créolisée au fil du temps. Ses chants dansés sont accompagnés de tambours et de chachas (maracas) alors que ceux de la Martinique sont un mélange de la civilisation africaine et française. Les danses chantées sont jouées par des instruments mélodiques : piano, flûte, clarinette, etc. accompagnés par des diverses percussions. C'est le même schéma que la musique populaire noire américaine.
Cependant, la musique martiniquaise a gardé de l'Afrique sa prédominance du rythme et l'indissociabilité du chant et de la danse.
Le Bèlè martiniquais
Le bèlè (bel-air) est un art complet comprenant aussi bien des danses, du rythme, de la musique et de la parole ou du conte. Folklorisée au cours du 20ème siècle, rejetée par les élites, cette pratique populaire jouit d'un retour en grâce fulgurant. C'est un héritage des anciens esclaves qui le pratiquaient dans les rues Cases-Nègres aux abords des plantations en Martinique.

Le bèlè désigne à la fois la pratique artistique, que le tambour bèlè utilisé et les valeurs de cet art qui sont le partage, la solidarité et la résistance culturelle.
Un chanteur mène la musique avec une voix qui porte alors que se développe un dialogue entre danseur et joueurs de tambour. Le tambour est accompagné d’un rythme ti-bwa donné par deux baguettes qui percutent la partie arrière du tambour (voir image ci-dessous).
Le bèlè se compose de différents rythmes à 2 temps, 3 temps ou 4 temps. Ainsi, le « bèlè douce » et le « bèlè pityé » sont joués sur des rythmes à 2 ou 4 temps. Le « grand bèlè », le « belya » et le « marim bèlè » sont des danses à 3 temps.
Dans le bèlè, on danse courbé, les genoux fléchis, à la différence du « danmyé » qui est une danse de combat. Dans ces mouvements de lutte, le danseur de danmié doit pouvoir rebondir, lancer les pieds et les bras.
Le kalenda, autre rythme de 4 temps à la Martinique, est la seule musique qui se danse seule en Martinique.

Les principales danses du noyau bèlè se dansent selon une structure carrée comme le quadrille ou le grand bèlè. À l'intérieur des deux carrés, les danseurs se livrent à des prouesses individuelles, par deux.
Ainsi, il faut intégrer les codes gestuels et relationnels entre les danseurs dans le déplacement. La grâce, les échanges dans la danse, les rencontres rythmiques suffisent à intéresser un spectateur qui découvre le quadrille.

Les danses du bèlè se font en ronde (venezuel, kanigwé, woulé mango, ou le timbank) ou en ligne, qui impliquent des jeux entre les danseurs. Les danses diffèrent entre le nord et le sud de l'île car elles peuvent avoir des exécutions différentes. En fait, il existe un tronc commun et des diversités régionales. Pour voir des démonstrations de bèlè, n'hésitez pas à vous rendre à la Maison du Bèlè à Sainte-Marie.
Artistes de bèlè :
Les maîtres du bèlè sont incontestablement Ti-Émile (Emmanuel Casérus) et Ti-Raoul (Raoul Edmond Mondésir), les autres grandes figures sont Félix Casérus, Dulténor Casérus, Vava Grivalliers, Berthé Grivalliers, Clothaire Grivalliers, Féfé Marolany, Paul Rastocle, Benoit Rastocle, Carmélite Rastocle, Apollon Vallade, Félix Cébarec, Génius Cébarec dit Galfètè, Stéphane Cébarec, Boniface Cébarec, Saint-Ange Victoire, Robert Dessart, Siméline Rangon.